Qui sommes nous ?



*************** QUI SOMMES NOUS ?
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Nous sommes une association d'amateurs qui pratiquons la reliure pour notre propre plaisir. Notre local se situe à Draveil, au Village des Associations, 42, rue du Bout des Creuses.
Notre atelier est ouvert les Samedi matin (9h-12h) et après-midi (14h-17h), le Mardi matin et le Jeudi matin, et cela toute l'année.
Nous recevrons avec plaisir toute personne intéressée par la mise en valeur ou la sauvegarde des livres, pour connaître notre travail, nous voir à l'ouvrage, poser des questions, éventuellement s'inscrire à notre atelier, pourquoi pas ? ... cela à tout moment de l'année.
Donc à bientôt.........


Un mot du rédacteur en chef Camille
Ce blog est le blog de tous les Lieurs. Chacun peut y intervenir librement, insérer du texte, des photos,... Il n'y a pas de censure. Certes, on le constatera; la signature est le plus souvent celle de Camille...timidité ? réticence devant l'ordinateur ? Allez savoir ! Peu importe; qui a choisi le rôle de rédacteur se doit de l'assumer !
Mais là n'est pas mon propos. Rédacteur, certes, mais pas formateur. Dans mes articles, je présenterai des travaux d'adhérents. Je n'ai pas qualité pour les juger. Le choix des œuvres présentées ne résulte que de la bonne volonté des adhérents de me les confier pour les photos. Les remarques que j'y ferai ne reflètent que l'impression d'un quidam qui, certes, aime les beaux livres, mais sans compétence particulière sur le sujet de la reliure. Je me donne la position d'un journaliste, aucunement celle d'un spécialiste. Je tenais à préciser ce point, afin qu'il n'y ait pas de malentendu.




vendredi 10 octobre 2025

Quand les Lieurs se démultiplient...

 Christine double la mise...

...avec deux nouvelles reliures originales; deux techniques différentes, la plus simple n'étant pas forcément la moins convaincante.

Le Louvre

On ne trouvera dans cet ouvrage d'André Blum nulle collection de peintures, ni sculptures, objets d'art; pas même les plus connus; pas de Joconde ni de Picasso; mais en fait une histoire du bâtiment "Louvre", de sa vocation et de ses vicissitudes au long des 5 siècles jusqu'à nos jours.

D'abord construit pour abriter la Cour, il sera dévalorisé dès la construction de Versailles, et un peu oublié pour un siècle. Il abritera alors aussi bien un dépôt de blé, des échoppes et baraques diverses , des écuries, et sera même une source de matériaux pour des chantiers parisiens.

Il ne deviendra musée que sous la Constituante



Christine choisit pour cet ouvrage une solution originale. 

Le premier plat est percé de fenêtres dessinant le titre de l'ouvrage. 

A livre fermé, ces fenêtres laissent apparaitre le papier marbré de la garde couleur, comme une peinture qui figurerait dans l'ouvrage. 

On peut y voir une référence à la vocation essentiellement picturale du bâtiment.

On notera qu'en raison de l'épaisseur des cartons (3mm), l'évidement des fenêtres a nécessité le recours à la découpe Laser. Cette technique, unique pour la découpe dans des cartons épais, trouvera bien d'autres usages, n'en doutons pas, dans la réalisation de décors.

Les Hauts de Hurlevent, d'Emily Bronté

Considéré aujourd'hui comme un monument de la littérature britannique, ce roman n'a pas toujours fait l'unanimité. Sa violence a fait qu'on l'a cru un temps écrit par un homme, la conception de la femme au milieu du XIXème étant peu compatible avec ce style fortement transgressif.

Dans un milieu hostile de landes sauvages, qui d'emblée suscite une atmosphère angoissante, des relations amoureuses se nouent, mais dans l'ombre tournent facilement à la jalousie, quand ce n'est pas au désir de vengeance.

L'étrange Mr Heathcliff , rongé par le désespoir, en fera les frais.




Christine choisit pour cet ouvrage un décor simple, mais efficace. La couvrure noire pleine peau situe d'emblée le roman dans une nuit angoissante et vide. Le décor minimaliste est réduit à l'évocation d'une tour mystérieuse, comme il en existe de nombreuses en Angleterre, partiellement éclipsée par un énorme soleil rouge, plus tragique qu'éclairant.

On notera l'effet "peau de serpent" utilisé pour la tour, qui simule de manière très réaliste une construction rustique en "opus incertum". La pièce de titre large au dos, dans le même rouge, s'harmonise heureusement avec l'ouvrage.

Avis de la rédaction.  Cet exemple de décor, minimaliste, presque symbolique, mais suffisant pour communiquer l'atmosphère de l'ouvrage, nous parait être tout à fait dans l'esprit de la reliure moderne. En l'espèce, retenons le, le trop est souvent l'ennemi du bien.


...et Michèle se met en quatre...

...pour nous présenter quatre nouvelles reliures, sur des thèmes très variés. 

Trois-six-neuf, de Colette

Dans cet ouvrage, Colette nous raconte ses nombreux déménagements; de sa Bourgogne natale jusqu'au 9 rue de Beaujolais (c'est normal) à Paris, où elle vécut de 1938 à sa mort en 1954.

Dans une couverture bleue pleine peau, Michèle inscrit titre et auteur dans un joli mouvement courbe dégressif. Ce titrage étant au préalable découpé au Laser dans une cartonnette, le relief est obtenu par pression à l'émalène du cuir de couvrure sur cette base.

Le papier marbré "plume de paon" complète heureusement cette réalisation

Gaspard, Melchior et Balthazard, de Michel Tournier

Cet ouvrage nous raconte l'histoire des trois rois mages, mais aussi celle d'un quatrième roi, gourmand, parti en quête d'une friandise céleste.

La couvrure est un skivertex-papier animé par les silhouettes des 3 rois-mages, elles mêmes moulées dans le même skivertex.

Les gardes-couleurs du même papier confèrent une réelle homogénéité à l'ouvrage.


La Provence, de Camille Mauclair (Ed. Arthaud, 1944)

Cet ouvrage, d'un auteur plusieurs fois rencontré dans ce blog, nous emmène aujourd'hui vers des horizons ensoleillés. On y traverse la Vallée du Rhône, le coeur provençal; puis de Marseille à l'Argens, de la Sainte-Baume au Var et du Var au Ventoux, c'est un grand tour de Provence qui s'offre à nous.

Pour cet ouvrage, Michèle reprend la couverture d'origine sur une base souple, les cahiers étant montés sur des onglets de couleurs différentes. La couture apparente sur rubans est une originalité de ce travail.


Fanny, de Marcel Pagnol

Marius est parti sans donner de ses nouvelles, laissant Fanny enceinte. Panisse qui l'avait demandée en mariage est ravi; il accepte Fanny et son enfant. Le bébé nait mais Marius réapparait et veut reprendre son bien. Sur le refus de Panisse, Marius doit regagner son bateau.

La couvrure dans une toile bleue est incrustée d'un décor évoquant les voiles d'un bateau, découpé dans une peau de poisson; double référence à l'addiction de Marius pour la mer. Les gardes-couleurs en tourbillon de bleu s'accordent également avec ce thème. 

Le titre est moulé sur une forme découpée au scalpel dans de la cartonnette; on connait la pénibilité de ce travail

mardi 7 octobre 2025

Un bouquet de quatre anniversaires

 Ce 25 Septembre, les lieurs de Sénart étaient conviés à l'atelier, d'abord manière de se retrouver pour un nouveau départ après vacances, ensuite pour fêter les anniversaires des lieurs qui ont (malgré eux) gagné un an au cours de ces 3 derniers mois.

















Avec Agnès en "Maître de cérémonie", les lieurs Camille, Françoise, Gilbert et Pierre ont pu souffler leur bougie, opportunément plantée dans une brioche au chocolat.


Les mêmes ont ensuite reçu leur cadeau de l'atelier; un mug introuvable opportunément décoré de l'image d'une bibliothèque; enfin quelque chose qui parle aux lieurs. 

On aura noté que Gilbert a trouvé très commode de poser son mug sur la tête de Camille; par chance le mug était froid.



Après une courte présentation de quelques livres issus de nos travaux,  au cours de laquelle Camille a pu exposer quelques uns de ses "petits secrets" de relieur amateur, la matinée ne pouvait se terminer sans un sérieux "apéritif dinatoire"; dans une ambiance festive et décontractée qui augure bien de l'année à venir.

lundi 8 septembre 2025

Deux mosïques de cuir

 La mosaïque de cuir est un peu le graal de la reliure, de par le soin et l'exigence de précision qu'elle implique. Nos deux Lieurs Christine et Edmond s'y sont collés, pour deux ouvrages classiques de la littérature. Leurs réalisations sont relatées ci-dessous; au lecteur de juger s'ils ont été à la hauteur.

Le Lion

"Le Lion" est un livre "iconique" de Joseph Kessel, paru en 1958, où l'auteur, grand voyageur, montre sa sensibilité aux animaux comme aux humains des autres cultures. 

Le roman: Patricia, fillette de 10 ans et fille du Directeur d'une réserve d'animaux au Kenya, ayant apprivoisé un lionceau devenu lion, se heurtera à la tradition Masaï, qui veut qu'un homme n'est devenu adulte qu'après avoir tué son premier fauve. Quand il faudra choisir entre l'homme et le lion, c'est le lion qu'elle voudra sauver....mais....

Au delà de l'anecdote, Kessel donne à cette enfant une maturité qui reflète sans aucun doute la sensibilité de l'auteur: "Les noirs, c’est autre chose. C’est juste. Ils vivent avec les bêtes… Ils n’ont pas plus d’armes que les bêtes. Mais les blancs, avec leurs gros fusils, c’est pour s’amuser..."

Pour la couvrure de cette ouvrage, un lion magnifique s'imposait... 


... et c'est vrai qu'il est magnifique, ce lion puzzle en mosaïque de cuir. Le jeu des couleurs choisies suffit à créer un véritable modelé faisant jaillir le museau hors de la surface, de manière saisissante.

 La précision d'assemblage est au rendez-vous, malgré un nombre incalculable de pièces à découper et à assembler.  Un vrai travail de patience, et pour Christine un nouveau pari (on a l'habitude)... Pari gagné ? 

Le deuxième plat, plus simple, reprend les couleurs du lion, sous la forme de bandes parallèles alternées. L'ensemble affiche en définitive une belle harmonie chromatique.   

 

Le petit chose

Ce roman d'Alphonse Daudet, sous-titré « histoire d’un enfant » (1868), est le récit autobiographique d'une enfance perturbée, mais qui fera le terreau de l'adulte sensible et généreux que l'on connait.

 Poète, rêveur dans son être, mais dans son entourage  bousculé, malmené, trompé.. il connaitra l’amitié mais aussi la trahison, la cruauté, la réussite et la désillusion, l’amour mais aussi la tromperie, toutes aventures qu’il traversera en se laissant porter par la tendresse de son frère.

Dans ce cheminement jusqu'à son age adulte, il restera un enfant : « le petit chose »...

...et c'est un enfant rêveur qu'Edmond nous présente au premier plat, dans une mosaïque de cuir savamment composée.

Dans un beau cuir bordeaux, la figurine du héros apparait en incrustation au centre du premier plat. Le dessin minimaliste mais suffisant, c'est le visage d'un enfant qui s'interroge sur son devenir; on est dans le vrai.

Pour le reste, Edmond utilise tous les savoirs qu'il a accumulés au cours du temps: contre-plats veloutés avec charnières, gardes volantes "à la cuve" "maison", comme les tranchefiles en bandes de cuir, comme les dorures à la feuille d'or; de l'Edmond que l'on connait.

mercredi 3 septembre 2025

Quand des Lieurs travaillent à la chaîne…

 Cet article concerne la reliure de séries (plus ou moins longues) de livres : histoires à épisodes, collections de journaux, série d’histoire…, pour lesquels on souhaite une reliure coordonnée afin qu’ils fassent bonne figure dans une bibliothèque.

Ce contexte impose quelques contraintes, tant dans le choix de la technique de reliure que dans la réalisation pratique de la série. Ainsi il faudra de préférence opter pour une technique de reliure simple, facilement reproductible, avec peu (ou pas) de décor. Pour la réalisation, il faudra se placer en mode de travail "en série" afin que les volumes apparaissent comme assortis. Ainsi tous les cartons seront coupés en même temps, coutures, endossures enchaînées en séquence, etc…

Les premiers tomes de la série, à minima les deux premiers, joueront le rôle de prototypes ; le premier pour fixer la technique de reliure adoptée, le second pour arrêter un mode de travail « à la chaîne ». Le résultat se jugera plus au niveau de l’ensemble qu’au niveau d’un volume en particulier.

Agnès et Camille ont été confrontés à cette situation ; leur travail est présenté ci-après.

 

Agnès convoque le petit sorcier…

…Il s’agit d’Harry Potter, bien sûr, le petit sorcier qui au travers de chaque tome saura déjouer les sortilèges de son meilleur ennemi, le mage noir assassin de ses parents.

Harry, orphelin élevé dans une famille de moldus* réalisera qu'il est sorcier lorsqu'il fréquentera la prestigieuse Ecole de Sorcellerie Poudlard. Dès lors il n’aura de cesse d’affronter celui dont on ne peut prononcer le nom**….

Le premier opus de la saga (qui en compte sept) sort en 1997. De nombreuses voix s´élèvent alors pour protéger la jeunesse des effets néfastes que l´histoire pourrait avoir sur les jeunes esprits. A plusieurs reprises et en différents endroits du monde, les livres de JK Rowling ont fait l’objet d´autodafés.

De nos jours, en France,  Harry est étudié à l´ecole, fait l´objet de salons ; et le 30 août à la bibliothèque Sainte Geneviève,  un examen spécial HP aura lieu. 

Que dire sinon que les livres de JK Rowling ont donné le goût de la lecture à de nombreux jeunes et moins jeunes . Dans les pays anglo-saxons, lors des premières parutions, il existait même des couvrures spéciales adultes au côté de celles destinées aux plus jeunes.

 Pour la reliure des 7 tomes «en série», Agnès est confrontée à plusieurs défis Le premier vient de ce que les originaux sont des livres brochés-collés, sans cahiers. Le problème peut se résoudre de manière classique en reconstituant des cahiers par couture, mais la méthode est fastidieuse pour une série longue. Agnès opte donc pour une méthode récemment proposée par Camille : la couture par fils noyés (voir Art et Métier du Livre, Mai-Juin 2020, p. 29 à 31). Le deuxième défi concerne le matériau de couvrure. Oublions le cuir (respect de l’animal oblige), Agnès devra tester plusieurs produits non animaux, in fine un matériau synthétique, pour trouver la solution. 

Enfin le troisième défi concerne le décor. Comme dit dans l’introduction, le décor doit être simple et facile à reproduire. Agnès opte pour un simple lettrage « HP » dans le style du livre, en relief, reproduit pour chaque tome à l’identique par découpe Laser.

La photo ci-contre montre un des volumes de la série. Le montage ci-dessous présente l'ensemble de la réalisation. 

 

La coordination des formats de reliure et de couvrure est parfaitement réussie. 

Au total un travail de longue haleine, pour un résultat qu'Agnès pourra enfin livrer comme cadeau (promis de longue date) à sa fille. Les meilleurs présents sont ceux qui se font désirer.

* un moldus est celui qui n'est pas sorcier. Ca représente beaucoup de monde.

** Lord Voldemort, pour ne pas le nommer.

 

 Camille nous fait des histoires…

 …avec l’Histoire du Monde (pas moins) de Jean Duché, publié initialement dans une version brochée souple en 4 volumes dans les années 50. 

 De l'avis du relieur, cette série présente, en tant qu'ouvrage d'histoire générale, un intérêt particulier. Loin des traités classiques de spécialistes, le texte de Jean Duché se lit comme un roman; « le roman de l’histoire ». Jean Duché n'est pas un historien, mais un écrivain. Dans ce long récit, l'auteur recherche la synthèse des évènements plus que leur énumération, ne rejette pas l’anecdote, fut-elle badine, et ne cache pas ses opinions personnelles…Un ouvrage à conseiller (ndlr).

 Ces 4 volumes assez épais (800 à 1000 pages chacun), faisaient triste mine même après une première lecture (photo ci-contre); dos contre-courbés, coutures « cassées », couvertures froissées,... Camille choisit donc logiquement de les relier pour pouvoir les conserver dignement dans sa bibliothèque (et les lire et relire ultérieurement…).

Au vu de leur épaisseur, Camille choisit de les scinder en deux, ce qui, en ménageant un volume pour l’index, fera une série de 9 volumes.

La couture de chaque volume ne présente rien de particulier; il sera plus intéressant de considérer la couvrure. Le choix est clairement dicté par les principes évoqués en tête de l'article.  Le demi-cuir s’impose pour donner un aspect « ouvrage de bibliothèque », sans une consommation effrénée de cuir (comme pour des reliures pleine peau). Le demi-cuir est généralement associé au papier (cf. le format classique demi-cuir-papier). Mais le papier est fragile, surtout pour un  livre « d’usage » et nécessite des coins « cuir » pour le protéger. Camille lui préfère une formule inhabituelle "demi-cuir-toile". La seule difficulté consiste en la jonction du cuir et de la toile. Camille résous ce problème en ménageant une rainure verticale où les deux matériaux viennent se rencontrer. La jonction est cachée par une bande de papier de couleur qui amène, en plus, un modeste effet décoratif.

La photo ci-dessous montre l’ensemble de la réalisation, après adjonction des pièces de titre entre des nerfs, réalisées en dorure par le relieur.


 

dimanche 11 mai 2025

Les nouveaux relieurs ne cèdent rien aux anciens

 La première reliure d'Elisabeth

Elisabeth n'est des nôtres que depuis guère plus d'un an, ce qui est très court pour maitriser tant soit peu cette activité.

 

 Le petit ouvrage qu'elle nous propose: Sainte Marguerite de Cortone de Fançois Mauriac, représente en soi un exercice complet de reliure. Couture des cahiers, endossure, couvrure en toile et déjà un petit projet de décor sur les plats; les bases de notre activité sont en place.

 Les motifs ménagés dans la toile de couvrure composent deux fleurs stylisées; en fait identiques, en relief au premier plat, puis son négatif en creux au second plat.

Avec des gardes-couleurs en semis de fleurettes, le printemps nous sourit, on ne s'en plaindra pas.  

Le résultat donne une reliure sobre, mais de bon goût; un bon début à confirmer.


La boite de Maryse

 Maryse possédait ce petit ouvrage curieux au titre certainement affriolant : « Décret du 23 Octobre 1883 portant règlement sur le service dans les places de guerre et les villes de garnison » (ouf !), daté de 1888. L’ouvrage de très petit format (en cm 14 x 9 x 1,5 ) lui tenant à cœur pour des raisons familiales, elle souhaitait en assurer la conservation.

Il n’y a pas lieu de s’étendre sur le contenu de l’ouvrage ; un règlement est un règlement, même si l’on peut sourire aux « devoirs de la sentinelle »
 : « Lorsqu’une sentinelle aperçoit un incendie, elle crie « au feu »,… lorsqu’un individu est poursuivi par la clameur publique, elle crie « à la garde. Ces cris sont répétés de sentinelle en sentinelle jusqu’au corps de garde. Le chef de poste envoie le sergent ou un caporal avec plusieurs soldats… Il se conforme aux prescriptions des articles 66, 67, et 68 ». Ne peut-on craindre (ndlr) que la place soit carbonisée, l’individu lynché avant l’article 68 ; ce n’est qu’une question.

Enfin le problème de Maryse était le suivant : comment conserver un si petit livre en bibliothèque sans qu’il finisse écrasé par ses voisins ? Après discussion collective, il a été décidé de le loger dans une petite boite en forme de livre, ce qui lui donnerait suffisamment de présence dans les rayonnages de sa bibliothèque.
Des solutions à ce problème de boite-livre existent dans la littérature, par exemple sous la forme de deux boites emboitées complétées d’un dos semi-rond « usiné » dans du carton, le tout finalement habillé comme un livre ordinaire (en somme une troisième boite). 

Eu égard à la légèreté du livre, une solution plus « économe » a été proposée et développée conjointement par Maryse et Camille. On notera cependant qu’un assez grand nombre d’essais a été nécessaire pour aboutir à un résultat jugé satisfaisant.


Les détails techniques de la construction ne seront pas rapportés ici. Pour en savoir plus, on pourra consulter l'article du 5 Février 2025 : "Une petite boite pour un petit livre" dans le blog "www.restauration-livres-camille.blogspot.fr" à ce sujet. 

 Les photos ci-contre à gauche montrent la boite fermée, à l'aspect d'un livre ordinaire sous couvrure toilée.

Les photos ci-contre à droite montrent la boite ouverte, le livre étant en place à l'intérieur.

Schématiquement, le montage consiste en deux fausses boites qui s'emboitent naturellement l'une dans l'autre à la fermeture.

Les fonds et les cloisons sont coupés dans un carton "de calendrier", ce qui donne au final une construction assez légère mais suffisante.



Notre bonne ville de Draveil

Nos relieurs ont traité dans le temps plusieurs livres sur Draveil, ainsi 3 ouvrages sur notre ville ont été présentés dans ce blog, rassemblés dans un article de Juillet 2016. Ici, c'est un autre document que nous propose Gilbert: "Draveil, Un ancien raconte", signé précisément par un vrai ancien de la ville: Pierre Royer.

Un cliquant sur la photo ci-contre, on pourra revoir la photo du chêne d'Antin, maintenant disparu, qui fut longtemps un véritable emblème pour la ville.

De fait, Pierre Royer a habité longtemps les quartiers de Champrosay, puis Mainville, du début du XXème jusqu'en 1921, quartiers qui à cette époque étaient des villages distincts de Draveil.

On comprendra ainsi que l'auteur nous parle plus de ces villages que de la ville elle-même.

Champrosay abrita une véritable vie culturelle, avec les nombreux artistes qui s'y rencontrèrent. On citera d'abord ceux qui y ont vécu: Daudet, Nadar, Delacroix, mais aussi toutes les personnalités qui y sont passées: Flaubert, Pierre Loti, Renoir, Manet, Cézanne, Coppée, Henri Rochefort, Drumond, Marie Laurencin...

Au delà le livre fourmille d'anecdotes sur la ville et les villages; qui ne faisaient pas forcément bon ménage; ainsi disaient les habitants de Mainville "qu’ils ont tenu parfois tout Draveil au bout de leurs fourches".

Autre anecdote qui parlera aux Lieurs de Sénart : " on extrayait le meulière en creusant le sol, meulière destinée à la construction à Draveil, mais qui servit aussi à la construction du métro d’Austerlitz à Gare d’Orsay. Ces trous ont donné le nom à... la "rue des creuses".

C'est sous une reliure très soignée que Gilbert nous propose cet ouvrage

On y retrouve au premier plat le blason de la ville, avec le chêne d'Antin prenant ses racines dans la Seine, d'où la devise de la ville "Inter undas et arbores" (entre eaux et forêts). 

Le second plat présente, en mosaïque de cuir, une autre image emblématique de la ville, avec un fleuve stylisé (la Seine, bien sûr) embrassant une grand arbre (le chêne, sans aucun doute).

 Avec 4 nerfs en disposition quelque peu fantaisiste, Gilbert montre une bonne maitrise des bases de la reliure, tendance que l'on ne peut qu'encourager.

 Mais où sont les chèvres ?

 L'ouvrage qui nous est proposé par Edmond ": Le chemin des chèvres" est signé d'Henri Pourrat, infatigable conteur de son pays natal; l'Auvergne, nostalgique ardent du monde terrien, de la vie rurale et villageoise.

Le présent ouvrage se présente comme un errement désordonné parmi les collines et les villages d’Auvergne, mais où tout est prétexte à une réflexion  désabusée sur les comportements des hommes. Henri Pourrat nous promène ainsi à travers sa vision mi-conciliante, mi-critique, de ses semblables. 

Dans son imaginaire, le paysan devrait rester le pilier solide et pondéré d’une humanité bien (trop) agitée. La phrase suivante résume sa pensée en forme de leçon de sagesse : "je crois que l’ingénieur descend tout droit du laboureur, que l’industriel ne se passera pas de l’alliance avec la terre, …ainsi pourront se réconcilier les hommes

Mais dans cette histoire, où sont donc les chèvres ? Et bien, elles n’apparaissent qu’aux deux dernières pages du livre ; frugales, peu exigeantes, elles vivent de ce que leur donne la montagne… une leçon pour les hommes ?

 Pour illustrer cet ouvrage, Edmond poursuit avec ses techniques déjà éprouvées, mais qu'il améliore inlassablement: mosaïque de bois dans le cas présent, dorure des titres en direct sur les dos (ndlr progression très nette sur ce plan), tranchefiles en bandes alternées, gardes-couleurs "à la cuve" fabriquées "maison". 

Outre l'ancienneté, l'assiduité et la persévérance sont bien les clés de la réussite.


mercredi 26 mars 2025

Un scriptorium à Draveil

 Il peut être utile de rappeler ce qu'est un scriptorium. Un scriptorium est ce lieu, où autrefois, dans les monastères, les moines élaboraient ces magnifiques reliures que nous pouvons encore admirer dans les bibliothèques.

Or il se trouve que deux moines échappés d'une de ces officines se sont glissés parmi les Lieurs, à savoir les ci-nommés Frère Johannès-Franciscus (plus connu sous le sobriquet de Jean-François), et Frère Camillus (plus connu sous le patronyme de Camille), desquels nous avons pu soustraire quelques images de leurs travaux.

"L'antiphonaire" de Jean-François...

...un antiphonaire, ou un graduel, peut être un psautier, mais ni un évangéliaire, ni un sacramentaire, encore moins un lectionnaire, etc...on s'y perdrait un peu à travers tous ces termes liturgiques, qui ont au moins en commun de désigner des ouvrages impressionnants, et souvent magnifiques.

 Ainsi, l'ouvrage qui nous est proposé par Jean-François serait plutôt un graduel. Un graduel est généralement un ouvrage de grande taille qui était utilisé par les chantres groupés autour du livre (d'où son envergure) posé sur un lutrin. La musique était notée en grégorien, avec la notation carrée.

La réalisation d'une reliure pour cet ouvrage posait un double défi, en raison, d'une part, de son état de délabrement initial (ci-contre à droite), ensuite en raison de sa dimension générale (env. 42x33 dans le cas présent), un défi "de taille" au double sens du terme.

Jean-François opte ici pour un remontage complet avec couture sur grand cousoir (ci-dessus à gauche), recomposition de la couvrure à l'aide d'un cuir neuf (box de veau ou vachette, env 0,35 m2) et reprise des anciennes ferrures en cuivre 

Les photos ci-dessus montrent l'ouvrage après cet important travail de reliure, les deux plats avec les bretelles de fermeture, le dos à 5 gros nerfs et la gouttière .

La figure ci-contre montre les équipements complémentaires inhérents à l'usage de l'ouvrage: les bretelles cuir avec boutons de fixation, les coins de protection en cuivre aux angles, les cornières de renforcement en cuivre à la base pour la pose sur le lutrin. 

La photo la plus à droite avec la règle a pour but de montrer l'envergure de l'ouvrage.

Un vrai défi pour un relieur amateur.

La "lettrine" de Camille


L'ouvrage présenté dans cet article: "Jeanne de Vixouze",  écrit par Bruno Gontier*, censé se passer au XIVème siècle dans un village reculé d'Auvergne, est l'histoire d'une amitié naissante entre une jeune paysanne et une jeune châtelaine du pays. Mais lorsque cette amitié deviendra amour, dans ce pays rude corseté par les conventions, la vie ne sera alors plus possible ni pour l'une ni pour l'autre...

Camille choisit d'illustrer cet ouvrage au premier plat par une "lettrine" inspirée des décors flamboyants des manuscrits médiévaux. Sur un fond de dorure à la feuille d'or, Camille dispose les éléments de la lettrine, à savoir les lettres J, V qui sont celles du titre, et qui se prolongent par des motifs animaliers ou floraux.

Suivant une technique qu'il a déjà proposée et souvent utilisée sous le nom de "sertissage arrière", technique qui consiste à pousser le cuir de couvrure par l'arrière, la couche avec or est ramenée vers l'avant; les vides ainsi créés étant comblés par un "négatif" des pièces de couleur. 

La lettrine ainsi montée est disposée dans un décaissement de la couvrure, qui est un cuir ciré blanc. La coupe précise des pièces du "puzzle" est assurée par découpe laser, qui autorise une bonne précision.

Le cadre ci-dessus réunit un ensemble de détails de l'ouvrage: un gros plan sur la lettrine de 1er plat, un détail du dos avec auteur et titre, une mini-lettrine en forme de 2 cœurs au second plat, la tranchefile faite à partir d'une chaînette de pacotille, et les garde-couleurs en papier rouge velouté avec charnière.

* Bruno Gontier, auteur de l'ouvrage, est le fils de Camille Gontier, rédacteur en chef du blog et de cet article en particulier