Rédigé par Camille
Ce Mardi 24 Mai, nous étions neuf relieurs et quelques un de leurs conjoints, Paul,
Amap, Fabrice, Michèle M., Christine, Claude B. et une amie, Béatrice et
moi-même, à vouloir pénétrer tant soit peu le monde mystérieux de la
Franc-Maçonnerie, à travers l'exposition de la BNF sur le sujet.
Notre accompagnatrice, par le ton passionné de son discours, par son érudition ne nous a pas déçus.
Je vais tenter de restituer cette visite à travers quelques photos prises, sans la prétention d'être exhaustif, peut-être avec quelques erreurs que l'on n'hésitera pas à me signaler.
La Maçonnerie "opérative"
La maçonnerie, c'est au début une philosophie attachée à la construction des cathédrales, appuyée sur le concept de "Dieu, Grand Architecte de l'Univers" (miniature ci-contre: "La Cité de Dieu", Saint Augustin). Le Maçon est alors un constructeur qui se réfère au personnage Hiram de la bible, supposé architecte-bâtisseur du temple de Salomon. On lira ci-dessous sa légende, suivie d'un dessin de la base du temple (Sainte Bible, Lyon), et de 3 miniatures évoquant ce légendaire chantier ( "La fleur des histoires", manuscrit XVIème siècle).
Les outils de construction sont élémentaires (ci-contre), mais déjà
apparaissent des ouvrages manuscrits consacrés aux règlements ( en médaillon, "Le livre des métiers"; Etienne Boileau, fin
du XIIIème), ou des carnets comportant, entre autres, des représentations des techniques de construction de l'époque (ci dessous).
Plus tard, l'imprimerie favorisera la diffusion de véritables ouvrages techniques (ci-contre"Théorie et pratique de la coupe des pierres et des bois", 1737).
Au XVIIème siècle, dès lors que les maçons commenceront à recevoir dans leurs réunions des membres dits "acceptés", c'est à dire non opératifs, la maçonnerie "opérative" fera place progressivement à la Maçonnerie "spéculative", où le lien avec la construction s'effacera au profit de discussions philosophiques de toute nature.
La Maçonnerie moderne
De la Maçonnerie spéculative naîtra au XVIIème la véritable Maçonnerie moderne, initialement en Grande-Bretagne où se formeront les premières Loges, lieux de rencontre et d'échange sans lien avec la construction. Le symbolisme y tiendra dès lors une place centrale. Ainsi on verra ainsi apparaître un
"alphabet maçonnique", sorte de cryptage simple de l'écriture.
Les photos ci-dessous présentent une planche et un livre regroupant des symboles usuels de la maçonnerie, un commentaire sur la signification de l'équerre et du compas, et une montre où des symboles tiennent la place des chiffres (fin XVIIIème).
Les ouvrages relatifs à la Maçonnerie porteront dès lors les symboles de cette obédience; ainsi les deux livres ci-contre à g. et, plus tardif, un exemplaire du code Napoléon, à d.
La Maçonnerie "des lumières"
La Franc-maçonnerie va
accompagner fidèlement le mouvement "des Lumières". Des Loges vont se créer dans
toutes les grandes villes, telle la "Loge
des neuf sœurs", qui soutiendra la Révolution, et abritera Benjamin
Franklin et Voltaire.
On verra se rallier au mouvement maçon des personnalités
d'origines très différentes, tel Casanova (ci-dessous à
d.), qui sera initié en 1750, ainsi que de nombreux savants dans la
mouvance d'Isaac Newton et de la Royal Society ( Desaguliers, "cours de physique", à g.).
Mozart adhèrera au mouvement qui lui inspirera l'Opéra "La Flûte
enchantée", mettant en scène un parcours initiatique, sur fond de lutte
entre la lumière et les ténèbres.
La vie du "Frère maçon"
L
Ci-dessus, à côté d'une allégorie du temple (à g.), la maquette ouverte (au centre) représente la principale pièce de travail où chaque participant a une place bien définie. Au XIXème, on verra apparaître l'urne à voter (à d.) pour décider ou non de l'acceptation d'un nouveau Frère - plus de boules noires que de blanches et le candidat
est... "blackboulé".
Dans la Loge sont discutés les sujets les plus divers. Le document ci-dessous est un exemple de rapport faisant suite aux discussions en Loge sur la question de l'éducation.
Au delà des discussions philosophiques, les Frères sauront se divertir,
comme en témoignent les menus ci-dessous, et l'affiche du bal
maçonnique, sous couvert d'une fête de bienfaisance.
Les attributs du Maçon
La tenue de cérémonie du Maçon comporte de nombreux éléments distinctifs, dont le sautoir, différent suivant le grade (ci-dessous à gauche) ou le tablier (trois vues à droite). Ce dernier, relevé de sa fonction initiale de protection du maçon tailleur de pierre, devient une véritable œuvre d'art, de soie ou de satin, brodé ou peint, possédant une forte charge symbolique.
Les vues qui suivent représentent deux tabliers, l'un est celui d'un chevalier d'Orient, l'autre est dit "tablier de Voltaire"...
... et le suivant est un tablier de "Maîtresse maçonne" représentant l'"arbre de la
connaissance", connaissance supposée accessible aux seuls initiés.
Evolution et diversification
Après la révolution, la Maçonnerie adoptera les concepts de la République. Les principes seront ceux d'une démocratie laïque et pacifiste, comme en témoigne cette affiche au lendemain de la défaite de Sedan.
A partir du XIXème, le mouvement maçonique se diversifie. Ainsi vont apparaître des loges féminines,dont on voit ci-dessous le sautoir et le tablier.
Le mouvement inspirera celui des "Carbonari" en Italie (ci dessous à g, un certificat d'adhésion), la création d'un orphelinat maçonique (bannière à d.), et bien d'autres institutions parallèles.
Contestation
A partir de la fin du XIXème, le mouvement devra subir les assauts de la contestation, comme le montrent les affiches, expositions, publications ("Les mystères de la Franc-Maçonnerie; Léo Taxil), un jeu de l'oie satyrique (Le jeu de la casserole)...
et même un film à forte virulence antimaçonnique ("Forces occultes", 1943).